Une personne diabétique sur trois n'est pas consciente de sa maladie

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Une personne diabétique sur trois n'est pas consciente de sa maladie, relève l'Association du diabète (AD), qui lance une campagne de sensibilisation intitulée "Protégeons nos artères!" à l'approche de la Journée mondiale du diabète, le 14 novembre.

« La persistance d’un taux élevé de glucose dans le sang abîme lentement la paroi de ces vaisseaux. Tant l’ancienneté du diabète que son éventuel mauvais équilibre augmentent le risque de complications. Pas de discrimination : petits et grands vaisseaux, mais aussi les fibres nerveuses, sont visés par un excès prolongé de glycémie dans le sang. .

 

 « L’atteinte des vaisseaux peut impacter différents organes, détaille le Pr Régis Radermecker. Même s’il existe des mécanismes communs, il reste encore pas mal d’inconnues à élucider quant aux différents processus amenant l’altération parfois irréversible. Cependant, tous ces mécanismes ont un point commun : ils agressent lendothélium. Le tabagisme, l’hypertension, l’hypercholestérolémie, et la sédentarité majorent également les risques. »

 

UN BILAN QUI CHANGE TOUT…

 « Un bilan annuel est recommandé à toutes les personnes diabétiques, précisément afin de détecter l’apparition et la présence de complications :  il est essentiel de tout vérifier et de le faire régulièrement », assure le Pr Radermecker. L’intérêt d’une telle démarche ? Prendre les problèmes (s’il y en a…) en charge, afin d’assurer la meilleure qualité de vie possible de la personne.

« L’analyse des résultats recueillis après les tests sanguins, d’urine, les contrôles ophtalmiques et cardiologiques vise à éviter ou à retarder les complications. Les informations collectées permettent d’adapter les traitements : ceux contre le diabète seront peut-être revus afin de mieux équilibrer ce dernier, et des thérapies seront initiées afin de limiter les conséquences des complications décelées. Lorsqu’elles sont déjà présentes, il n’y a pas de retour en arrière possible mais, ajoute le Pr Radermecker, dans de nombreux cas, on peut palier l’événement suivant et donc ralentir, sinon éviter, leur progression. »

 

POUR CONTOURNER LE PRÉCIPICE…

Selon les vaisseaux touchés, les complications ont des effets variables selon les organes. Ainsi, pour le cœur, un essoufflement ou des douleurs peuvent apparaître. Ces symptômes précèdent parfois la survenue d’un infarctus ou une décompensation cardiaque potentiellement mortelle. Cependant, « une des spécificités de la maladie diabétique, c’est qu’elle est également capable de déclencher un infarctus non ressenti par la personne (mais détectée lors du bilan) », précise le diabétologue. De manière générale, 30 % des personnes diabétiques - donc près de 1 sur 3 - connaissent des problèmes cardiovasculaires au sens large. Elles sont confrontées à des infarctus de deux à quatre fois plus souvent que le reste de la population, et ces infarctus sont deux fois plus mortels chez elles.

De leurs côtés, les complications touchant aux artères du cerveau sont à l’origine d’accidents vasculaires cérébraux (AVC). « Leurs symptômes sont un signe d’urgence médicale absolue afin, grâce à la rapidité des traitements, de tenter d’éviter leurs séquelles : la paralysie et la mort », précise-t-il.

Le rétrécissement des gros vaisseaux des jambes risque de provoquer des douleurs mais, aussi, de boucher ces artères, avec un risque ultime d’amputation (des traitements et/ou une intervention chirurgicale visent à l’éviter). Lorsque le diabète abîme progressivement les nerfs des jambes et des pieds, des sensations de fourmillement, des douleurs (parfois fortes) mais aussi une perte de sensibilité sont à craindre. Lorsque la douleur n’est plus un signe d’appel, le risque d’avoir des blessures ou des ulcères non repérés et non soignés s’accroit. En cas d’infection, gangrène et d’amputation peuvent survenir.

Par ailleurs, les atteintes subies par les fibres nerveuses sont aussi à la source de neuropathies qui touchent les membres inférieurs, la pression sanguine et le cœur (les efforts deviennent plus difficiles), le système digestif (avec par exemple un ralentissement de la vidange de l’estomac, d’où de possibles vomissements après les repas). Les organes sexuels ou la vessie sont également concernés. Dans le monde, 26 % des personnes diabétiques connaissent une neuropathie diabétique douloureuse.

L’usure des petits vaisseaux provoque aussi d’importants dégâts au niveau des reins, dont le fonctionnement est alors moins efficace, avec le risque d’une insuffisance rénale chronique. Le traitement sera la mise sous dialyse ou, plus rarement, la transplantation rénale. Selon le Centre européen d’étude du diabète, le risque de voir des personnes diabétiques être dialysées est 9 fois supérieur au reste de la population. Aux Etats-Unis, 35 % des personnes diabétiques vivent avec une maladie rénale chronique…

Enfin, une des complications les plus fréquentes dues à un diabète mal équilibré se manifeste au niveau des yeux. La détérioration des petits vaisseaux de la rétine peut faire baisser progressivement la vision et/ou mener au développement d’un œdème maculaire. De plus, l’installation d’une rétinopathie diabétique (une atteinte de la rétine), lorsqu’elle n’est pas suivie et traitée, peut entraîner, au stade ultime, une cécité. Cette pathologie est la première cause de cécité avant l’âge de 65 ans… En France, on estime que 50 % des personnes diabétiques sont concernées par cette complication.

LA VOIE DE LA RAISON

Décliner la liste des complications liées aux atteintes des vaisseaux par un diabète non équilibré ne vise pas à faire peur. « Dans un premier temps, il faut se battre pour éviter qu’elles surviennent, rappelle le Pr Régis Radermecker. Puis, si des complications sont détectées, il s’agit de mettre tous les atouts de son côté afin de ralentir leur progression. Chacun dispose d’un capital santé. L’objectif consiste à tout faire pour le conserver, comme on préserverait tout autre capital, y compris un capital d’amour. Actuellement, nous disposons d’outils pour dépister les complications mais, aussi, dans de nombreux cas, d’outils thérapeutiques pour y répondre et retarder l’évolution de ces complications. Ainsi, les avancées des traitements concernant les néphropathies (les maladies des reins), les maladies cardiaques ou celles de la rétine permettent de réduire leurs conséquences. » Pour les neuropathies, la prise en charge des douleurs peut être plus compliquée… mais les traitements évolueront sans doute à leur tour.

En attendant, un fond d’œil, un bilan sanguin et urinaire ainsi que cardiologique, puis l’examen du patient et l’écoute de ses plaintes guident les diabétologues lors du bilan annuel. Toutes les informations récoltées permettent d’agir de manière positive, dès que cela est nécessaire et sans laisser les maladies gagner du terrain. « Plus on détecte tôt, plus on peut être pro-actif », glisse le diabétologue. Décidément, le slogan de cette journée du diabète ne s’y trompe pas. Comme le dit le Pr Radermecker : Prendre soin de ses vaisseaux et s’en assurer, via un bilan annuel, peut permettre de marcher à côté de la falaise… en continuant à profiter du paysage.