Traitement de la ménopause : des chercheurs pointent un risque accru de cancer lié à la prise de fezolinetant

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Trois chercheurs de l’UNamur, ont découvert que le fezolinetant, utilisé pour le traitement de certains symptômes liés à la ménopause était associé à un risque accru de développer un cancer. Leurs résultats de recherche viennent d’être publiés dans le prestigieux magazine scientifique The Lancet, la première revue scientifique au monde.

Prescrit pour soulager certains symptômes indésirables vasomoteurs modérés à sévères déclenchés par la ménopause comme les sueurs nocturnes, ou les bouffées de chaleur, le fezolinetant a été approuvé cette année par l’Agence Fédérale américaine des Médicaments (Food and Drug Administration - FDA) et a obtenu mi-octobre une opinion positive de la part de l’Agence européenne des Médicaments (EMA). Ce produit se veut être une alternative non-hormonale aux thérapies de substitution tels que les dérivés estrogéniques. Néanmoins, comme tout nouveau médicament agissant sur des nouvelles cibles thérapeutiques, il est essentiel de se questionner sur les risques pouvant survenir avec ce nouveau traitement.

Le Professeur Jonathan Douxfils du Département de Pharmacie, le Professeur et Doyen de la Faculté de médecine Jean-Michel Dogné et la Docteure Charlotte Beaudart du Département des Sciences Biomédicales se sont penchés sur cette question et leur travail a débouché sur une importante publication dans le prestigieux journal, The Lancet.

Leurs analyses ont ainsi montré que le fezolinetant était associé à une augmentation substantielle du risque de cancer endéans la première année de traitement. Ce risque a été observé sur base d’une réanalyse des données des études de phase-3[1] disponibles publiquement.

Ainsi, dans le cadre du programme d’étude clinique visant à évaluer l’efficacité et la sécurité du fezolinetant, le groupe placébo présentait un risque de développer un cancer de 0.21% par an ; un risque qui est similaire à celui rencontré dans la population générale aux États-Unis dans la même tranche d’âge. En revanche, le risque observé dans le bras traité avec du fezolinetant à la dose de 45 mg était de 1.46%. Présenté autrement, ceci signifie qu’un cas de cancer va apparaitre tous les 80 patients traités sur une période d’un an. « Grâce à des techniques statistiques métaanalytiques permettant le rassemblement de données cliniques provenant de différentes études,  nous avons pu conclure que le fézolinétant augmentait le risque de 4.25 fois », précisent encore les trois chercheurs namurois.

« Étonnamment, la FDA ne mentionne pas cette augmentation du risque de cancer dans les informations relatives à la prescription (dernière observation du document le 1/11/2023). L’Agence européenne du Médicament ne s’est pas non plus prononcée sur ce risque, mais les informations actuellement disponibles ne sont que partielles et il est probable qu’une analyse particulière des cas soit documentée au niveau de l’organisme de règlementation européenne. Ces données devraient être disponibles en fin d’année », soulignent les trois chercheurs.

D’un point de vue pharmacologique, les chercheurs namurois suggèrent que cette augmentation du risque serait lié au mécanisme d’action du fézolinetant qui, en antagonisant le récepteur 3 à la neurokinin B, inhiberait la libération de kisspeptine depuis les neurones Kisspeptin Neurokinin B Dynorphin (KNDy). Des travaux complémentaires seront néanmoins nécessaires pour supporter ces explications.

Ces résultats doivent encore faire l’objet de recherches notamment pour déterminer si d’autres effets, peuvent être responsables de leurs observations. Par ailleurs, les analyses finales sur le fézolinetant doivent encore être remises par l’Agence européenne du Médicament.

 

[1] Les études de phase 3 sont des études cliniques qui sont réalisées avant la mise sur le marché du produit et qui sont utilisées par les autorités règlementaires pour se positionner sur une approbation de commercialisation du produit sur le marché.